Gallimard

BROWN Carter – En cabane, papa !

Réf: pt-gcn240
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Description

Titre original « The born loser » Carter Brown, 1973

Traduit de l’américain par Marcel Frère

Extrait 1

   Le Superphoto Pete est situé dans une ruelle obscure entre les 4e et 5e Rues, et semble tombé dans l’oubli depuis vingt ans. La petite devanture est tout encombrée de portraits immortalisant les grands moments de la vie, tels que le mariage, le bachot et autres événements mémorables. Une sonnette grelotte lorsque j’ouvre la porte et une vingtaine de secondes plus tard, un type s’amène au comptoir. Il paraît avoir largement passé la soixantaine et il est un tantinet décharné. Sa façon de me regarder par-dessus ses lunettes cerclées d’acier semble parodier l’inévitable personnage de convention qu’on a vu dans le film qui passe tous les matins à trois heures à la télé.

   - Pete ? je demande avec curiosité.

   - Moi, c’est Archie. Pete est mort voici une dizaine d’années, onze peut-être.

   J’exhibe mon insigne, lui annonce qui je suis, puis lui montre la photo de Carol Siddell. Il la regarde un long moment, puis hausse ses maigres épaules.

   - Notre timbre est au dos, faut donc croire que c’est bien l’une des nôtres. Je ne me souviens pas d’elle, mais c’est un beau petit lot, hein ?

   - Oui.

   - Je peux consulter les archives, lieutenant. Ça pourrait prendre un moment.

   - J’attendrai.

   Ça lui prend environ cinq minutes ; sur quoi il rapplique avec une expression de triomphe mitigé.

   - J’ai tout ça ici, annonce-t-il en flanquant un registre délabré sur le comptoir. Ça date de cinq mois environ. Le 10 mars pour être exact. Elle n’a commandé que deux agrandissements, alors peut-être que ça ne lui plaisait pas trop. Mais à mon avis, c’est sûrement une bonne photo.

   - Elle a laissé une adresse ?

   - Je l’ai ici, dit-il tandis que l’index de sa main droite souligne l’inscription sur le registre. Zana Whitney, Sunrise Drive, Valley Heights.

   - Vous êtes sûr ? Je grommelle.

   - Pour sûr que je suis sûr ! (Il me regarde froidement de côté par-dessus ses lunettes d’acier.) Vous croyez que je ne sais pas lire ou quoi ?

   - Je vous demandais si vous étiez sûr que c’était bien ce nom et cette adresse-là. Il ne se serait pas glissé une erreur dans le numérotage ou ailleurs ? Vous n’auriez pas le nom de Carol Siddell sur la même page ?

   Son index parcourt soigneusement toute la page, ligne par ligne. Sur quoi il secoue la tête avec fermeté.

 

Extrait 2

   Il est environ cinq heures quand je rentre au bureau. Annabelle, qui est en train de mettre sa machine à écrire sous sa housse, me paraît préoccupée.

   - Le shérif est là ? Je demande sans aucun enthousiasme.

   - Il est rentré chez lui depuis une heure, dit-elle. Il reçoit le maire à dîner.

   - Avec de la sauce aux airelles ?

   Elle fait la grimace :

   - Le docteur Murphy est passé voici une heure à peu près. Il a laissé les rapports d’autopsie sur votre bureau. Mais comme il sait vos difficultés pour lire les mots de deux syllabes, il a dit que vous pouviez téléphoner chez lui s’il y a quelque chose que vous ne compreniez pas.

   Elle tire sur la mini-jupe avec énergie, ce qui lui dissimule un bon centimètre de cuisses, tapote ses cheveux blonds miel, puis m’adresse un regard hésitant.

   - Al, fait-elle avec un sourire mal assuré. Est-ce que j’ai l’air bien ?

   - Superbe, comme toujours, je réponds promptement.

   - Sérieusement ?

   - Sérieusement, vous n’avez rien perdu de la beauté, de la séduction qui sont votre apanage. Pourquoi ?

   - Pour rien, dit-elle en haussant légèrement les épaules. C’est seulement que j’ai rendez-vous ce soir, et je n’ai pas le temps de rentrer me changer à la maison.

   - Stuart Whitney ? je demande.

   - Ne soyez pas stupide ! Il s’appelle Greg Ballantyne, et je l’ai rencontré à une soirée la semaine dernière.

   - Qu’est-ce qu’il fait ?

   - Ça m’étonne que vous n’ayez jamais entendu parler de lui, fait-elle d’un air supérieur. Mais il est vrai que les plus belles choses de la vie vous échappent toujours, n’est-ce pas ? Vous êtes trop occupé à courser de pauvres filles autour de votre sacré divan pour accorder à votre esprit la part qui lui revient.

   - C’est un psychiatre ?

   - C’est pour l’instant l’animateur d’une table ronde à la télévision, dit froidement Annabelle. Tout le monde trouve que c’est le programme le plus passionnant qu’on n’ait jamais vu.

   - Voilà qui semble s’annoncer comme une passionnante soirée intellectuelle. Avez-vous déjà songé au sujet que vous allez aborder ?

   - Au sujet ?

   - Ben oui, dis-je en haussant légèrement les épaules. Un cerveau comme le sien, vous ne voudriez pas passer pour une gourde, n’est-ce pas ? Supposez qu’il veuille parler de l’Atlantide, par exemple ?

 

Descriptif

Editions Gallimard Carré Noir 240 année 1976, état général moyen, couverture souple, tranche et dos moyennement marqués et un peu passés, intérieur assez frais, livre d’occasion broché format poche de 11x17,8 cm, 192 pages

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