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GEORGE Elizabeth – Cérémonies barbares

Réf: pt-p4206
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Description

Titre original « Well-schooled in murder » Suzan Elizabeth George 1990.

Traduit de l’américain par Dominique Wattwiller

Extrait 1

   L’horreur la fit se figer. Une aiguille de glace lui traversa la colonne vertébrale, la clouant au sol. Les détails prirent une acuité brutale, propulsés jusqu’à son cerveau par la violence du choc.

   Deborah sentit ses lèvres s’entrouvrir, l’air s’engouffrer dans ses poumons avec une force inhabituelle. Seul un hurlement de terreur aurait pu parvenir à chasser cet air suffisamment vite pour les empêcher d’éclater.

   Mais elle était dans l’incapacité de crier. Et d’ailleurs, l’eût-elle fait, qu’il n’y aurait eu personne pour l’entendre. Aussi se contenta-t-elle de chuchoter : « Oh seigneur ! » Puis, bien inutilement : « Simon ». Après quoi, malgré elle, elle regarda, mains crispées, muscles raidis, prête à courir s’il le fallait, dès qu’elle aurait retrouvé l’usage de ses jambes.

   L’enfant était étendu en partie sur le ventre, juste derrière le mur de silex, dans un lit d’herbe aux écus. A en juger par la longueur et la coupe de ses cheveux, il semblait bien que ce fût un garçon. Et il était mort. Aucun doute là-dessus.

   A supposer que Deborah eût été assez stupide ou assez hystérique pour se persuader qu’il n’était qu’endormi, il lui eût été impossible d’expliquer pourquoi il dormait complètement nu alors que l’après-midi touchait à son terme et que le froid se faisait de plus en plus vif. Et pourquoi sous un bouquet de pins où l’air était encore plus frais et qu’il eût été s’il s’était allongé sous les derniers rayons du soleil de l’après-midi ? En outre, pourquoi dormait-il dans cette étrange position, le poids du corps reposant sur la hanche droite, les jambes écartées, le bras droit bizarrement replié, la tête tournée vers la gauche, les trois quarts du visage enfouis dans l’herbe aux écus ? Pourtant sa peau était rosée – presque rouge -, signe qu’il y avait encore de la chaleur, de la vie dans ce corps, que le pouls battait, que le sang coulait…

   Les écureuils recommencèrent à se chamailler, descendirent le long de l’arbre qui leur avait momentanément servi d’abri, escaladant la forme inerte qui gisait au pied du tronc. La griffe minuscule du premier écureuil se ficha dans la cuisse gauche de l’enfant, retenant l’animal prisonnier. Des piaillements frénétiques fusèrent, une lutte farouche s’engagea : talonné par son poursuivant, l’écureuil piégé se débattait avec violence. La chair de l’enfant se déchira soudain. L’animal prit la fuite.   

 

Extrait 2  

   En pénétrant dans le laboratoire de chimie, Lynley constata que le sergent Havers n’avait pas exagéré en prétendant que le bâtiment et ses salles ne devaient pas avoir subi de transformations majeures depuis l’époque de Darwin. Le labo était en effet loin d’être un exemple de modernité. Des conduites de gaz couraient au plafond, le parquet était plein de fentes, l’éclairage à la limite du glauque, la tableau noir si usé que les problèmes qui le couvraient semblaient se fondre dans les centaines d’autres qui les avaient précédés.

   Les huit élèves présents, perchés sur des tabourets en bois ridiculement hauts, étaient assis devant des plans de travail blancs tout éraflés surmontés de planches de pin. Les paillasses étaient équipées de petits éviers rectangulaires en porcelaine, de brûleurs à jet de gaz en fer rouillé et de robinets de cuivre. D’un côté de cette partie de la pièce, des vitrines occupaient tout un panneau, qui contenaient des cylindres gradués, des pipettes, des flacons, des béchers ainsi qu’un assortiment remarquable de bouteilles fermées par des bouchons de liège contenant des produits chimiques et couverts d’étiquettes manuscrites. Au-dessus de ces vitrines s’alignaient – bien calées sur leurs supports en bois – de hautes burettes destinées au mélange des divers produits chimiques versés goutte à goutte. Le mélange lui-même s’effectuait dans la sorbonne placée sur une paillasse de l’autre côté du labo, cette enceinte – qui n’était pas elle non plus de la première jeunesse – était une boite de verre et d’acajou dotée d’un vieux ventilateur rouillé.

   Le laboratoire aurait dû être entièrement remanié des années plus tôt. Qu’il n’ait pas été modernisé donnait une idée assez juste de la situation financière de l’école. Et des pressions diverses qui s’exerçaient sur Alan Lockwood, lequel devait faire tourner l’établissement, recruter de nouveaux élèves et trouver d’une façon ou d’une autre les capitaux nécessaires à la modernisation des locaux.

   Comme lisant une condamnation implicite dans le regard de Lynley, l’enseignante se dirigea vers l’antique sorbonne et abaissa la vitre avant. Une fine pellicule obscurcissait la paroi de verre. Elle se tourna ensuite vers les élèves qui avaient cessé de travailler pour dévisager Lynley et Havers.

   - Vous avez des problèmes à terminer, leur rappela-t-elle en traversant la salle pour gagner la porte. Je suis Emilia Bond. Professeur de chimie. En quoi puis-je vous être utile ?

   Elle parlait d’un ton décidé, plein d’assurance, mais Lynley ne put s’empêcher de remarquer la petite veine qui battait de façon saccadée sur son cou.

   - Inspecteur Lynley, sergent Havers, service des affaires criminelles, Scotland Yard, répondit-il bien que l’attitude de la jeune femme lui eût montré l’inutilité des présentations. (Emilia Bond savait de toute évidence qui ils étaient et ce qu’ils étaient venus faire dans son laboratoire.) Nous aimerions nous entretenir avec un de vos élèves, si possible. Brian Byrne.

   Tous les yeux, ceux de l’enseignante exceptés, se braquèrent sur le voisin de Chas Quilter. Il ne releva pas immédiatement la tête mais continua de se pencher sur le cahier ouvert devant lui, crayon en l’air.

 

 

Descriptif

Editions Pocket 4206 année 1994 ISBN 2266061488, état général moyen, couverture souple, tranche et dos moyennement marqués et passés, intérieur assez frais, livre d’occasion broché format poche de 11,2x17,8 cm, 386 pages   

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