Le Grand Livre du mois

HERMARY-VIEILLE Catherine - Lola

Réf: rf-glmchvl
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Description

Extrait 1

   Ces deux pauvres petites ne doivent pas rester seules, décida la générale Brown. Notre devoir est de les accueillir.

   - Et le major Craigie ? suggéra le général.

   - Ce serait inconvenant, mon cher. Craigie est un homme d’honneur mais, que diable, c’est un homme. Quand le deuil de Margareth sera terminé, le major pourra l’épouser s’il le désire encore. Auparavant, je ne vais pas laisser compromettre la réputation de cette pauvre Mme Gilbert en la laissant à l’abandon.

   La vie chez les Brown bouleversa l’existence de Lola. Bienveillante mais extrêmement rigide, Sarah Brown essaya d’entreprendre l’éducation de l’enfant négligée jusqu’alors. On lui refit un trousseau orné de rubans noirs en signe de deuil, l’obligea à se vêtir chaque jour décemment, interdiction fut faite de courir, de parler fort. Elle fut contrainte à se tenir droit à table, une main sur ls genoux et dut faire sa prière chaque soir, comme supporter sans broncher le dimanche les interminables sermons du pasteur. Tout en essayant d’obéir, la fillette se cabrait. Un jour où elle refusait de donner à Mme Brown une simple flûte de roseau qu’elle cachait derrière son dos, elle reçut des coups de règles sur les doigts. Quand par rétorsion Lola refusa de paraître au dîner, le général Brown lui administra le martinet. Son seul refuge restait Nalini. La jeune Indienne la berçait contre sa poitrine, racontant encore et encore ses histoires fantastiques, effrayantes ou burlesques, toujours les même : la victoire du singe Rama, la légende de l’homme loup ; celle où Rahu poursuivait la lune pour la dévorer afin de se venger de l’avoir découvert au moment où il dérobait l’ambroisie à Vichnou et la préférée de Lola, celle de Saniti, qui peuplaient désormais l’imagination de l’enfant, déesses violentes et toutes puissantes, voluptueuses bayadères, ranis ensorcelées d’amour.

   Un an presque jour pour jour après la mort d’Edward Gilbert, Margareth, insensible à la cour pressante que lui faisait un jeune et pauvre officier, épousa le major John Craigie, de vingt-trois ans son aîné. Une cérémonie simple à laquelle n’assistaient que les Brown, le docteur Simpson et le juge de district. La fillette reprit alors sa vie libre et sauvage, on ne l’amena plus à l’église. Inquiet de l’indocilité croissante de l’enfant, John Craigie dénicha à Dinapur une vieille dame, veuve depuis vingt années d’un pasteur, qui n’avait pu par lassitude ou manque d’argent, regagner l’Angleterre. Très cultivée, un peu fantasque, Abigael MacDaniel sut s’attacher Lola qui en quelques mois fit de remarquables progrès en lecture, écriture et dessin. Parfois le samedi, elle menait la fillette dans son modeste bungalow. Au piano, elles jouaient ensemble de vieilles rengaines écossaises avant de prendre le thé au jasmin et de danser dans le salon comme des elfes cabriolant dans les landes autour d’Aberdeen.

 

Extrait 2  

   A Londres, l’argent fuyait à une vitesse inimaginable. Lola qui se faisait un point d’honneur de ne pas être entretenue par son amant, voyait s’évaporer les mille livres de son beau-père qu’elle avait crues inépuisables. Charles ne lui envoyait que des fournisseurs de luxe avec lesquels on se ruinait sans même s’en apercevoir. Vêtements, parfums, objets de toilette, chapeaux, gants et souliers, les cadeaux qu’elle offrait à son amant, lui coûtaient une fortune. Mais comment courir les boutiques comme une bourgeoise lorsqu’on partageait la vie d’un dandy vers lequel la jeunesse dorée de Londres avait les yeux tournés ? Lola avait été accueillie de la meilleure façon. Une vague déception cependant l’empêchait de jouir pleinement de son existence. Les assiduités dont elle était l’objet la gênaient. Ces beaux messieurs se comportaient-ils ainsi avec leurs femmes ? Elle aurait voulu s’imposer autrement que par ses dentelles ou ses chapeaux, mais ne savait comment.

   - Tu es ridicule ! se moquait Charles lorsqu’elle rapportait une attitude, un mot ayant blessé son orgueil. Si quelque chose te déplaît, punis le coupable, il sera à tes pieds.

   - Ce n’est pas ce que je cherche.

   En jui, quatre mois après son arrivée à Londres, Lola dut signer un billet à ordre de trois cents livres afin de payer un cheval conseillé par Charles. De sa fortune, il ne restait donc que deux cents livres. Que ferait-elle lorsqu’elle serait ruinée ? Lui faudrait-il tendre la main, s’humilier devant son amant pour qu’il la fasse survivre ? L’idée la révoltait.

   Assis en face de Lola à la table du petit déjeuner, Charles en robe de chambre de velours rubis, ouvrit la missive que son valet venait de lui apporter.

   - Tien, un bal chez lord et lady Hamilton, murmura-t-il. Je suppose qu’ils veulent caser leur fille. Avec la dot qu’ils offrent, ce sera chose facile.

   - Les avons-nous aperçus à Londres ?

   - Non, ils possèdent des milliers d’acres dans le Yorkshire et ne viennent ici que rarement. Mais leur hôtel de Knightbridge est une merveille.

 

Descriptif

Editions Le Grand livre du mois année 1994 ISBN 2259025625, état général moyen, couverture souple, tranche et dos moyennement marqués et passés, Intérieur assez frais, livre d’occasion broché grand format de 13,8x20,3 cm, 480 pages   

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