JAMES P.D. – La salle des meurtres

Réf: pt-egpdjsm
4,00 € TTC
 En stock
Ajouter au panier
Description

Titre original « The murder room » Phyllis Dorothy James, 2003

Traduit de l’anglais par Odile Demange

Extrait 1

   Dalgliesh resta muet. Après l’avoir dévisagé un bref instant et avoir constaté l’infime crispation des mains sur le volant, Ackroyd préféra changer de sujet. « J’ai plus ou moins renoncé aux potins, dans la Review. Ils n’ont de valeur que lorsqu’ils sont de toute première fraîcheur, d’une véracité incontestable, et calomnieux. Mais dans ce cas, on risque toujours un procès. Les gens sont tellement procéduriers. J’essaie de me diversifier un peu. C’est là la raison de ma visite au Dupayne. J’ai décidé de consacrer une série d’articles au meurtre, symbole d’une époque. L’assassinat sous l’angle de l’histoire sociale, si tu veux. Nellie pense que ça pourrait marcher du tonnerre, Adam. Elle est très emballée. Prends les crimes victoriens les plus célèbres, par exemple. Ils n’auraient pas pu se produire à un autre siècle. Ces salons encombrés, étouffants, les apparences à préserver, la soumission des femmes. Quant au divorce – à supposer qu’une épouse pût alléguer de bonnes raisons pour le demander, ce qui était loin d’être facile -, il mettait celle-ci au ban de la société. Pas étonnant que ces malheureuses aient fait tremper du papier tue-mouches à l’arsenic dans le thé de leurs époux. Mais ces années-là sont les plus simples à interpréter, je te l’accorde. L’entre-deux-guerres est nettement plus intéressant. Une salle du Dupayne présente les crimes les plus célèbres des années 1920 et 1930. L’objectif n’est pas d’exciter la curiosité morbide du public – ce n’est pas le genre de la maison, tu peux me croire – mais d’étayer mon point de vue. L’assassinat, le crime par excellence, est un paradigme de son temps. »

   Il s’interrompit et fixa attentivement Dalgliesh du regard pour la première fois : « Tu as l’air fatigué, mon vieux. Tout va bien ? Tu n’es pas malade, au moins ?

   - Non, non, Conrad, je ne suis pas malade.

   - Nellie remarquait hier encore que tu te fais bien rare. Tu es tellement occupé avec cette équipe au nom inoffensif qu’ils ont créée pour enquêter sur les crimes sensibles. « Sensible », voilà un terme merveilleusement bureaucratique. Comment définit-on un crime « non sensible » ? Enfin, tout le monde sait ce que cela veut dire. Si quelqu’un découvre à la Chambre des Lords le grand chancelier en toge et en perruque, gisant dans son sang après s’être fait tabasser à mort, on appelle Adam Dalgliesh.

 

Extrait 2

   La bouche encore à moitié pleine de pain, il demanda : « C’est vrai que le musée va fermer et qu’on va tous être virés ? »

   Tally réussit à effacer toute trace d’inquiétude de sa voix : « Qui t’a dit ça, Ryan ?

   - Personne. J’ai surpris une conversation.

   - Tu ne devrais pas faire ça, voyons !

   - J’l’ai pas fait exprès. J’étais en train de passer l’aspirateur dans l’entrée, lundi, et Miss Caroline était à l’accueil en train de causer avec Miss Godby. Elle a dit : « Si nous n’arrivons pas à le convaincre mercredi, le musée fermera, c’est tout simple. Mais il finira sûrement par entendre raison. » Puis, Miss Godby a dit quelque chose que j’ai pas entendu. J’ai juste surpris quelques mots avant que Miss Caroline parte. Elle a dit : « Gardez ça pour vous. »

   - Et tu crois que tu aurais effectivement dû le garder pour toi ?

   Il posa sur Tally de grands yeux innocents. « C’est pas à moi qu’elle parlait, Miss Caroline. On est mercredi aujourd’hui. C’est pour ça qu’ils viennent tous les trois cet après-midi. »

   Tally posa ses deux mains autour de son bol de soupe, mais elle n’avait pas encore commencé à boire. Elle craignait de ne pas arriver à porter la cuiller à ses lèvres sans trembler. « Je suis surprise que tu aies entendu autant de choses, Ryan. Elles parlaient sans doute très doucement.

   - Oui, c’est sûr. Comme si c’était un secret. J’ai entendu que les derniers mots. Mais elles font jamais attention à moi. C’est comme si j’étais pas là. Si elles m’ont remarqué, elles ont dû se dire qu’avec le bruit de l’aspirateur je n’entendrais rien. Ou peut-être que ça leur était égal que j’entende ou pas. Je ne compte pas. »

   Il parlait sans la moindre trace de ressentiment, mais il fixait le visage de Tally et elle savait qu’il attendait sa réaction. Il restait une croûte de pain dans son assiette et, sans la quitter du regard, il commença à la déchiqueter, avant de rouler les miettes en petites boules qu’il disposa sur le bord.

   « Bien sûr que tu comptes, Ryan, dit-elle, et le travail que tu fais ici aussi. Il ne faut pas te dévaloriser comme ça. C’est idiot.

   - Je m’en fiche de ce que les autres pensent de moi. Je suis payé, non ? Si le boulot me plaisait pas, je m’en irais. Mais ce coup-ci, je risque d’être forcé de partir. »

 

Descriptif

Editions de Grenelle année 2004 ISBN 2744174033, état général assez bon, couverture souple, tranche et dos moyennement marqués et un peu passés, intérieur assez frais, tranches des pages moyennement salies, livre d’occasion broché grand format de 13,7x21,7 cm, 468 pages

Produits pouvant vous intéresser