Titre original « The dead zone » Stephen King, 1979.

Traduit de l’américain par Richard Matas

Extrait 1

   Le téléphone réveilla Sarah à neuf heures moins le quart. Elle se sentait affreusement patraque. Elle avait encore mal au cœur. C’était certainement Johnny.

   - Sarah ! (Ce n’était pas la voix de Johnny. C’était Anna Strafford, une collègue qui enseignait l’espagnol au collège, une fille enjouée que Sarah appréciait beaucoup. Mais ce matin, Sarah avait plutôt l’air sombre.)

   - Comment te sent-tu Sarah ?

   - Couci, couça, Johnny a dû t’expliquer. J’ai dû mal digérer…

   - Mon Dieu ! Sarah, tu ne sais pas… (La voix se brisa. Sarah s’en étonna, mais très vite son étonnement se mua en inquiétude lorsqu’elle prit conscience qu’Anna pleurait.)

   - Anna, que se passe-t-il ? Qu’est-il arrivé ? C’est Johnny ?

   - Il a eu un accident. (Sa correspondante avait réussi à se ressaisir.) Il se trouvait dans un taxi, il y a eu une collision, c’est Brad Frenan qui conduisait l’autre voiture. Je l’avais dans ma classe d’espagnol. Il est mort… Et Johnny…

   - Johnny… hurla Sarah.

   - Il est dans un état critique, Sarah. Dave Pelsen a appelé l’hôpital ce matin. Il n’y a guère d’espoir… enfin… »

   Anna parlait toujours – mais cette voix était lointaine, inaudible. Sarah était anéantie, sourde. Elle revoyait les yeux de Johnny, ces yeux si incroyablement violets, à force de bleu et de noir mêlés.

   « Ce n’est pas possible, murmura-t-elle. Pas possible. »

   Et la voix d’Anna, entêtée, insistante.

   « Ils ont dit à Dave qu’il ne reprendrait jamais conscience, même s’il survivait à l’opération. Ils vont être obligés de l’opérer à la tête parce que…

   - Johnny ! »

   Sarah s’évanouit. Sans doute pour fuir cette affreuse réalité.

   « Sarah ! Sarah ! Sarah ! »

   Le téléphone pendait au bout du fil, oscillant faiblement.

Extrait 2

   Herb lut l’article, puis jeta la feuille sur la table avec dégoût.

   « Tu devrais faire un procès à ce fils de pute. Ce n’est rien d’autre que de la diffamation, Johnny. Un travail de démolition délibéré.

   - D’accord, d’accord », dit Johnny.

   Dehors, il faisait nuit. La neige tombait silencieusement. Le vent hurlait sous l’auvent. L’allée avait disparu sous la progression des petites dunes.

   « Mais il n’y a pas eu de témoin et Dees le sait très bien. C’est sa parole contre la mienne.

   - Il n’a même pas eu le courage de signer ce mensonge, dit Herb. Regarde-moi ça, un « informateur de Vue intérieure ». Qui est-ce, cet informateur, qu’il se nomme, voilà ce que je dis.

   - Oh ! C’est impossible dit Johnny. Ils en font une question de principe, gros titres, articles vengeurs et anonymes. Dans la mesure où je suis directement concerné, ils me rendent service. Je ne veux pas faire carrière en révélant au public où les vieux cachent leurs actions, le billet de loterie qu’il faut acheter. C’est de la démence !

   - Je ne vois pas le rapport avec cet article dégueulasse.

   - Si les gens pensent que je suis un imposteur, peut-être me laisseront-ils tranquille.

   -Oh ! dit Herb. Oui, je vois ce que tu veux dire. (Il alluma sa pipe.) Tu n’as jamais beaucoup apprécié ton nouveau don, n’est-ce pas ?

   - Non, dit Johnny. C’est pourtant la seule chose qui semble intéresser mon prochain.

   Quand il allait au magasin faire des courses, la caissière essayait de prendre son argent sans toucher la main de Johnny. L’expression inquiète, apeurée de son regard ne pouvait tromper personne. De même, les amis de son père lui faisaient un petit signe au lieu de lui serrer la main. Au mois d’octobre, Herb avait engagé une jeune fille pour venir faire le ménage une fois par semaine. Au bout de trois semaines, elle les avait quittés sans donner de raison précise ; sans doute, lui avait-on appris pour qui elle travaillait en réalité.

Descriptif

Editions Le Livre de poche 7488 année 1992 ISBN 2253035262, état général correct, couverture souple, tranche et dos moyennement marqués et passés, pages jaunies, livre d’occasion broché format poche de 11,2x16,7 cm, 480 pages