LOZI Jean – Le commandant

Réf: j-asp195
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Description

Illustration de couverture de Pierre Joubert

Illustrations intérieures de Francis Bergèse

Extrait 1

   L’inconnu s’assit en face de moi et Monsieur Leroy prit place à ses côtés, la tête entre ses doigts longs et maigres d’organiste. Je sus que l’entrée en matière venait de s’achever, que nous allions débattre un problème d’homme, et que je devais oublier un passé lumineux et puéril qui s’arrêtait à ce moment précis. D’ailleurs, la main de l’inconnu effleura rapidement la nappe ; c’était comme pour balayer tout sentiment, toute référence à ma jeunesse.

   - Cette nuit, une patrouille allemande a intercepté, par le plus grand et le plus malheureux des hasards, l’un de mes hommes qui transportait des armes, mais aussi un document en code d’une extrême importance. Le prisonnier se trouve maintenant dans une des caves du château, et le document dans le tiroir du bureau de Monsieur Bertoncinelle. Le châtelain, sa cuisinière et la famille Lethellier sont des amis. Tu saisis ? A l’arrivée de la compagnie, Monsieur Bertoncinelle a été exilé dans une mansarde, et sa domestique chez les Lethellier, dans le pavillon de l’entrée. Mais le Capitaine qui se prend pour un aristocrate, alors qu’il n’est en réalité qu’un gourmand, a autorisé Bertoncinelle à conserver l’usage de la cuisine et de la salle à manger, sous la condition de bénéficier aussi des services de la cuisinière. C’est ainsi que Bertoncinelle, qui se trouvait avec Maria, a pu surprendre l’interrogatoire de Fabien, notre malheureux agent de liaison, par l’intermédiaire du téléphone pneumatique qui relie le bureau à la cuisine. Le Capitaine parle français. Il se dit correct. Il voulait connaître la signification du document, ce que Fabien ignore de toute façon. Il a donné à notre agent de liaison un délai de vingt-quatre heures pour le renseigner, jusqu’à l’arrivée de la gestapo, demain matin à dix heures. Nous ne pouvons plus rien pour Fabien. Le parc et le bâtiment sont truffés de soldats : la moindre action de force équivaudrait au suicide. Mais nous devons absolument récupérer le document qui contient des renseignements précis et compromettants sur notre réseau. Les spécialistes ennemis parviendront à le déchiffrer. Ce n’est qu’une question de jours… et alors !

 

Extrait 2

   Parvenus à une dizaine de mètres, au-delà des buissons, les hommes s’arrêtèrent ; le silence retomba. Il me semblait impossible que je fusse à l’origine de cette pause surprenante, mais j’éprouvai toutefois un sentiment d’alarme fort désagréable. Un étrange cheminement, comme celui d’un animal en quête, acheva de m’effrayer. Je vis soudain la masse sombre d’un énorme chien se précipiter sur moi, avec deux ou trois aboiements brefs. JE n’eus que le temps de m’agripper aux basses branches du noisetier et de me rétablir. Le fauve sautait en menant grand tapage. Je fermai les yeux, un instant. J’appelai un miracle, mais ce furent deux soldats qui arrivèrent, la mitraillette pointée. Je fus saisi de vertige et faillis tout lâcher. Le chien ne se calmait pas. L’un des hommes le retint par le collier ; l’autre me cria : « Komm ! » et ponctua l’ordre d’un geste éloquent. De mon observatoire, je considérais la scène comme un étranger. Il me semblait que j’allais soudain me réveiller ailleurs, en classe, dans la cuisine ou dans mon lit.

   - Komm ! répéta le militaire.

   Je dégringolai de mon perchoir. L’homme me saisit par le bras, me secoua en grommelant une phrase que je ne compris pas mais qui me parut peu engageante. Son camarade demeurait à quelques pas, maintenant à l’aide d’une courroie le chien qui grognait. Je ramassai mon mouchoir et le champignon que j’avais abandonnés. Le soldat m’entraîna parmi les fourrés. Je n’avais pas prononcé une seule parole. Je me demandais encore ce qui m’arrivait, et surtout ce qui allait m’arriver.

   Nous débouchâmes dans une seconde allée, plus large que l’autre et tapissée d’herbe rase. L’homme me poussa devant et répéta « Komm ! » pour la troisième fois. Son compagnon marchait sur mes talons. JE sentais le mufle du chien contre mes mollets et je n’avais aucune envie de m’enfuir. J’essayais de comprendre comment j’étais arrivé à me fourrer dans un tel guêpier.

 

Descriptif

Editions Alsatia Signe de piste 195 année 1968, état général moyen, couverture souple, tranche et dos moyennement marqués et passés, pages jaunies, livre d’occasion broché moyen format de 13,3x19,3 cm, 168 pages   

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