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MANZOR René – Les âmes rivales

Réf: pt-p15421
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Description

Extrait 1

   Sa cellule avait la taille d’un débarras de deux mètres sur un mètre cinquante. Elle était assise sur un lit de camp adossé au mur et regardait dans le vague. L’élégance de sa tenue contrastait violemment avec l’aspect sordide de son cachot. Mais elle ne semblait pas s’en soucier.

   Cassandre savait qu’elle n’avait pas d’autre solution que de partir. Loin de la maison de Garden District qui l’enchaînait à son passé. Loin de la Nouvelle-Orléans où elle avait grandi. Loin des commérages à son sujet. On la disait maudite. Et le fait est que son parcours était jalonné d’incidents étranges.

   A présent que sa mère était morte, plus rien ne la retiendrait ici. Pas même… celui dont elle s’interdisait de prononcer le nom.

   Cassandre Latour avait vécu les dix premières années de sa vie à se demander pourquoi personne ne voyait cet homme extraordinaire qui vivait sous son toit. Pourquoi il ne mangeait jamais. Pourquoi il s’intéressait tant à elle. A cinq ans, il était ce compagnon de jeu imaginaire, dont personne ne devait connaître l’existence. Tantôt magicien, tantôt clown. A neuf ans, il était le prince charmant de la fillette. A douze, il l’éveillait sexuellement.

   La puberté de Cassandre avait modifié leurs rapports. L’ami était devenu amant. Un amant possessif et jaloux qui exerçait sur elle une influence proche de l’addiction. Cette relation exclusive l’avait coupée du monde. Elle avait délaissé ses amis, ne parlait guère plus à ses parents.

   Jusqu’alors, elle avait été une excellente élève. Et pour cause ! Celui dont elle s’interdisait de prononcer le nom était un formidable répétiteur. Ses connaissances en histoire et en sciences naturelles étaient truffées d’anecdotes pratiques qui permettaient à la fillette de briller auprès de son institutrice et de ces camarades. A douze ans, elle avait déjà sauté deux classes. Elle s’exprimait dans une syntaxe bien plus riche que celle de ses proches.

   Mais le plaisir physique était venu balayer tout ça. Les demandes obsessionnelles de la chair et leur parfum d’interdit avaient corrompu l’esprit de Cassandre. Son attention en classe déclina. Ses notes chutèrent en vrille. Au point que ses parents s’en inquiétèrent.

 

Extrait 2  

   - Thomas Wells ? s’exclama Rachel, abasourdie en suivant le médecin dans son bureau. Il se prend pour le député ?

   Le professeur Phillips invita Paul et Rachel à s’asseoir face à lui.

   - Vous m’avez dit qu’il était question que Matt s’occupe de l’affaire Wells, avant son accident. Il est très fréquent, pour ce type de sujets de confondre leur dernier souvenir marquant avec leur mémoire identitaire.

   - Il a peut-être entendu ce nom à la télé pendant qu’il était dans le coma, proposa Paul.

   - C’est probable, rétorqua le médecin. L’isolation sonore n’est pas très bonne. Et avec le battage médiatique qu’ils font en ce moment… Du reste, j’ai fait retirer la télévision de sa chambre. Et je vous demande de ne pas évoquer l’affaire Wells avec lui. C’est encore trop tôt. Le choc pourrait se révéler néfaste.

   - Vous pensez que Matt…

   Paul fut incapable de terminer sa phrase, tant il craignait de donner vie à ses appréhensions. Le médecin s’en rendit compte et crut bon de souligner :

   - Il est encore trop tôt pour affirmer quoi que ce soit. Je ne veux pas vous donner de faux espoir, mais les tests sont encourageants.

   Paul hocha la tête, les larmes aux yeux.

   - C’est un cas assez rare d’amnésie. Nous l’appelons amnésie psychogénique. Le patient ne se souvient ni de son nom ni de son visage ni de sa famille. Toute son histoire personnelle semble être effacée. En revanche, il sait compter, lire, conduire. Ses facultés socioprofessionnelles sont intactes.

   Paul porta sa main devant sa bouche, pour masquer son émotion.

   - Combien de temps, avant… qu’il puisse reprendre le travail ? demanda Rachel ?

   - un mois ? Deux mois ? Difficile à dire, maître.

   Rachel soupira longuement. Le professeur prit pour de la compassion amicale ce qui n’était que contrariété professionnelle.

   - Tout cela peut être réversible. Il faut garder espoir. Il a déjà accepté de répondre à son prénom, le reste devrait suivre.

 

Descriptif

Editions Pocket 15421 année 2016 ISBN 9782266233613, bon état général, couverture souple, tranche et dos légèrement marqués et passés, intérieur assez frais, livre d’occasion broché format poche de 11,2x17,8 cm, 386 pages   

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