Extrait

1/   La neige tombait en flocons serrés, muette, étouffant les rares murmures d’une aube encore imprécise. Kristian Fowey gara sa Mercédès entre deux Chevrolet vert militaire, descendit.

   Le froid s’empara de lui, aigre, lui mordit le visage. Il se hâta vers les trois marches poudrées de blanc qui donnaient accès à la grande porte vitrée, pénétra dans le hall dont la chaleur paraissait presque suffocante en comparaison de l’extérieur.

   L’un des deux plantons qui se tenaient dans la salle de service s’avança vers lui, détailla avec insistance les traits massifs de son visage, comme s’il cherchait à se convaincre qu’il était réellement en présence de celui qu’il avait pour mission d’accueillir et qu’il ne s’agissait pas d’une supercherie.

   - Le colonel vous attend, sir, prononça-t-il sur un ton impersonnel.

   Kristian Fowey fit tomber sur le tapis-brosse la neige qui s’était collée à ses chaussures, se secoua pour détacher les flocons qui restaient accrochés à son manteau et à ses cheveux blonds coupés court.

    - Je connais le chemin…, dit-il au planton qui s’apprêtait à le guider.

   L’homme se figea au garde-à-vous.

   - Je regrette, sir, émit-il, les ordres sont formels. Personne ne doit plus pénétrer dans ce bâtiment sans être accompagné. La décision vient directement du colonel.

   Kristian Fowey jeta un bref regard dans la salle de police, aperçut les deux mitraillettes posées sur le bureau, chargeur engagé. L’idée lui vint que ces nouvelles mesures de sécurité pouvaient difficilement ne pas être sans relation avec le fait qu’on l’ait convoqué au milieu de la nuit ; il hocha doucement la tête, se dirigea vers l’ascenseur.

   - Je vous suis…

2/   Le centre de détection et de contrôle TELEGRAM était implanté à l’intérieur d’un périmètre de deux kilomètres sur deux, légèrement au nord de la petite ville d’Uslar dans les monts Solling.

   Afin de parer à une éventuelle attaque atomique, les installations essentielles avaient été enterrée en profondeur dans les alvéoles d’une ancienne usine souterraine du IIIe Reich réaménagée pour la circonstance.

   Les constructions en surface avaient été réduites au maximum dans le but d’éviter un repérage aérien. A part les antennes radio et radar et une dizaine de bâtiments occupés par certains services techniques et les unités de protection, disséminés dans la forêt et soigneusement camouflés, TELEGRAM s’apparentait à une gigantesque fourmilière pratiquement invisible pour un ennemi venu par air.

   La base proprement dite avait été construite à une dizaine de kilomètres, entre Uslar et la station. Outre un terrain pour appareils légers de reconnaissance et une zone d’atterrissage pour hélicoptères, elle comportait tout ce qui est nécessaire à une formation importante pour subsister en vase clos : locaux d’habitation pour les militaires et leurs familles, clubs, terrains de sport, salle de cinéma, piscine…

   Pour compléter l’ensemble, une unité d’engins Hawk et Nike sol-air était installée à l’est de TELEGRAM pour servir de protection en cas d’attaque directe contre le centre radar.

   Kristian se présenta au poste de garde de la station à une heure et demie précise. Il avait été bloqué à la sortie de Göttingen par un carambolage en série et n’avait pu combler son retard à cause du verglas qui rendait la conduite particulièrement délicate sur le tronçon Hardgesen6Uslar et dans toute la forêt.

Descriptif

Editions Edition Fleuve Noir Espionnage 436 année 1964, état général correct, couverture souple, tranche et dos marqués et passés, pages jaunies, tranches des pages moyennement salies, livre d’occasion broché format poche de 11,2x17,8 cm, 224 pages