Extrait
1/ Elles étaient là, alignées, formant une haie devant laquelle avançaient les prisonniers. Pour la plupart, elles offraient un spectacle dantesque, fellinien. Edentées, mafflues, les seins avachis, les hanches enrobées d’une graisse malsaine, le cheveu rare ou hirsute, elles étaient plantées sur leurs jambes variqueuses et, comme des maquignons comparaient d’un regard lubrique les avantages respectifs des partenaires qui leur étaient proposés.
Il s’agissait là d’une innovation du directeur de l’établissement pénitentiaire, Don Sabatino, dont Mendoza avait dit qu’il professait des idées d’avant-garde. Chaque dimanche après-midi, pour la sieste, il offrait aux détenues de la Section Femmes la compagnie d’un mâle de la Section Hommes. C’étaient-elles qui choisissaient, et il était interdit à ceux sur qui tombait le verdict de refuser l’accouplement, quels que soient la laideur de celles qui les avaient élus et, partant, le manque d’enthousiasme dont ils témoignaient.
2/ Le crépuscule tomba, puis la nuit, et il devint plus ardu encore de cheminer sur le sentier de chèvre. Des cailloux roulaient sous les pas des trois hommes puis dégringolaient la pente aride. A un moment, Novak dérapa, et Coplan le retint de justesse par le bras.
- Vacherie de montagne, grogna l’Américain.
- On ne peut quand même pas utiliser de torche, rappela Coplan. Il faut être discrets.
- C’est en effet préférable, à cause des gardes-frontières. Ils sont capables de nous allumer, grommela Novak en se redressant.
La difficile progression se poursuivit. Enfin, trois quarts d’heure plus tard, leur guide s’arrêta. Novak faillit le renverser en butant dans son dos.
- La frontière est franchie, indiqua le vieillard. Vous n’avez plus rien à craindre.
De la besace qu’il portait en bandoulière, il sortit une torche électrique qu’il tendit à Novak.
- A partir d’ici, le sentier descend. Quelqu’un vous attend près du village. Bonne chance.
Et il fit demi-tour.
Au voisinage du petit bourg blotti dans la vallée, un homme se détacha de la masse sombre d’un bosquet de pins d’Australie.
Descriptif
Editions Fleuve Noir Espionnage Kenny 158 année 1990 ISBN 2265043885, Assez Bon état général, couverture souple, dos et tranche légèrement marqué et passés, pages jaunies, tranches des pages un peu salies, livre d’occasion broché format poche de 11,2x17,8 cm, 192 pages