Robert Laffont

MAC DONALD Betty – L’œuf et moi

Réf: r-rlpbmdom
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Description

Titre original « The egg and i »

Traduit de l’anglais par Georges BELMONT

Extraits

1/   J’avais neuf ans quand nous déménageâmes pour venir nous installer à Seattle, dans l’Etat de Washington. Fini la vie de pionniers ; il s’agissait maintenant de préparer l’avenir. Du moins suis-je certaine que ce fut l’idée de papa et maman, quand ils commencèrent à nous faire prendre à Mary et à moi, des leçons de chant, de piano, de danses folkloriques, de danse classique, de français et d’art dramatique. Si seulement ils avaient pu se douter de ce que réservait l’avenir, de ce qu’il me réservait en tout cas, ils se seraient épargné des tas de dépenses et de peines : pour ma future vie de fermière, quelques heures par jour, bouclée dans le frigidaire, à contempler un saladier plein d’œuf, auraient constitué un premier entraînement infiniment plus utile que, mettons, le français ou les leçons de danse classique. Passe encore pour le français : il m’a servi, si l’on peut dire, à lire les livres d’auteurs anglais bilingues, mâles ou femelles ; mais, du point de vue de la conversation courante, ce fut un désastre : la plupart du temps je n’eus d’autre interlocuteur que moi-même et il faut être Français d’origine pour se promener par le monde en se parlant à soi-même en français.

   En plus de ces injections de culture, nous nous trouvâmes précipités de but en blanc, nous les enfants, dans le tourbillon d’un vaste programme sanitaire. Plus de sel dans nos plats ; à boire entre les repas seulement ; bien mastiquer cent fois avant d’avaler ; lever à cinq heures du matin ; bains froids ; exercices physiques en musique ; tennis. De même (pour l’hygiène de ‘esprit, j’imagine) défense d’aller au cinéma ou de lire les illustrés amusants. Dans l’une des maisons où nous demeurâmes, qui avait appartenu au consul du Danemark, il y avait une immense salle de bal en sous-sol, que papa transforma immédiatement en gymnase è barres parallèles, paniers de basket-ball et matelas de caoutchouc.

 

2/   En dépit de sa situation, je n’ai jamais eu l’impression que notre petite ferme se blottissait dans le giron protecteur des monts Olympiques. Ils n’avaient rien de protecteur, ces monts. Chaque fois que je regardais par la fenêtre ou que je mettais le nez dehors, je me trouvais face à face avec les géants blancs et hautains ; ils m’ignoraient dans leur contemplation lointaine et faisaient de leur mieux, glacialement, pour me pénétrer de l’idée que ce pays était autrefois quelque chose de très bien et de très magnifique et que cela leur gelait les sangs de devoir accepter qu’on y « fît des affaires ». Nous pouvions bien être là, avec nos laideurs de petites bicoques et de bétail ; mais Dieu merci ! rien ne les forçait, eux, à avoir quoi que ce fût à faire avec nous, ni à nous dire « Faites comme chez vous ». Nul doute qu’ils n’eussent volontiers donné la moitié de leurs forêts pour être en Suisse et nous balayer d’une bonne grosse avalanche.
   Durant tout ce printemps et cet été-là, leur hostilité évidente se limita cependant à la plus stricte passivité. Quand vint septembre, ils enfoncèrent jusqu’aux épaules leur bonnet de brouillard, comme des cagoules du Ku-Klux-Klan, et se mirent en devoir de nous prodiguer l’hydrothérapie.

 

Descriptif

Editions Robert Laffont Pavillons année 1951, Assez Bon Etat général, couverture souple, tranche et dos passés et marqués avec de petits accrocs, pages jaunies, tranches des pages moyennement salies, livre d’occasion broché grand format de 14,3x20,6 cm, 350 pages

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