Fleuve Noir

PELOT Pierre – Roman toc

Réf: pt-fnsp1952
1,50 € TTC
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Description

Extraits

1/   Le type s’approcha en prenant son temps. A quelques mètres de la voiture, il marqua un arrêt, regardant quelque chose sur sa droite, sourcils froncés, puis il reprit sa marche. Il boitait très fort, totalement déhanché, balancé de gauche à droite. Chacun de ses pas lui demandait un effort incontestable qu’à l’évidence il effectuait sans y penser, habitué depuis longtemps au handicap. Il pouvait avoir entre vingt-cinq et trente ans, anguleux, maigre, la poitrine creuse, les cheveux très noirs et bouclés. Il flottait dans un pantalon de grosse toile, style battle-dress, reteint en noir et délavé, les poches cuissardes bourrées de choses, pleines à craquer, pendouillant comme des besaces. Une veste kaki tombait de ses épaules plongeantes, les poignets retournés. Ses pieds étaient chaussés de tennis avachies et noires de graisse.

   Jack descendit sa vitre et salua le type d’un hochement de tête.

   - M’sieur ? fit l’homme.

   Il renifla, planta la main dans une de ses poches et en sortit un immense mouchoir à carreaux rouges.

   Jack demanda le plein.

   - Sans problèmes, m’sieur, fit le type.

   Il se moucha bruyamment tout en se dirigeant, bancal comme jamais, vers la pompe. Jack le rappela pour lui donner les clefs. Le pompiste servit l’essence d’une main tout en continuant de se moucher de l’autre…

   Jack Meridien retira ses lunettes, cligna des yeux. Il regarda longuement la façade de la station, la collection de panneaux publicitaires de toutes sortes. Un bâillement lui tira la mâchoire. Il plia les branches des lunettes et glissa celles-ci dans sa poche de poitrine. Le pompiste revint vers lui, précédé par un nouveau coup de trompe dans le mouchoir à carreaux. Il tendit les clefs à Jack, acheva de s’essuyer le nez, hocha la tête d’un air contrit :

   - Vous avez déjà vu une crève pareille ?

   Jack fit une grimace impressionnée, en réponse à l’interrogation.

   - Eh bien, sans blague, moi non plus, dit le pompiste en repliant son mouchoir. Cinquante-sept francs, m’sieur. Je vous fais le pare-brise ?

 

2/   Ils avaient surgi de la nuit, de la pluie. Jack n’avait remarqué aucune voiture garée devant la station ou ailleurs, le long des trottoirs de la rue. Il faut dire qu’il n’y avait prêté la moindre attention, filant comme une flèche sous l’averse en rasant le mur. Sept ou huit clients juchés sur les tabourets occupaient le bar, d’un bout à l’autre ou presque du L inversé, certains marqués aux épaules par le déluge du dehors. Ils formaient quatre groupes, buvaient des bières, des cafés, des alcools ; plusieurs mangeaient des steaks hachés, des œufs, des salades.

   Le juke-box braillait dans le rouge de l’atmosphère et les conversations entrecroisées.

   Deux jeunes vêtus de jeans, des patches hard-rock cousus dans le dos de leur blouson, trituraient mollement un des flippers tout en sirotant des canettes.

   Quatre tables sur six étaient occupées. Près de la porte d’entrée, un couple entre deux âges, avec un enfant sage, picoraient des frites tout en laissant courir leurs regards aux alentours, comme s’ils se nourrissaient autant de l’ambiance que de ce qui se trouvait dans leurs assiettes. Aux autres tables, c’étaient des hommes en complets gris, à la face rougeaude, qui riaient fort, parlaient haut, buvaient du cognac et ne laissaient planer aucun doute quant à leur profession – en moins de vingt secondes vous saviez qu’ils revenaient d’une foire-exposition commerciale et que le secteur informatique proposait des merveilles, que le plan de création d’emplois en France était une rigolade, etc. Ils liquidaient leurs cognacs avec un enthousiasme rare.

   Seuls, le couple et l’enfant grignoteurs de frites levèrent les yeux sur Jack lorsqu’il entra. Le gamin s’était si bien débrouillé qu’il arborait une large virgule de ketchup sur sa joue gauche.

   Derrière le bar, tout en servant, la blonde et Billy-Bonbon faisaient la conversation avec les consommateurs. La blonde surtout. Billy-Bonbon se contentait de sourire imperturbablement, d’une oreille à l’autre, quoi qu’il entende et que l’on s’adresse à lui ou pas.

 

Descriptif

Editions Fleuve Noir Spécial Police 1952 année 1985 ISBN 2265030155, état général moyen, couverture souple, tranche et dos moyennement marqués et passés, intérieur passé, tranches des pages un peu salies, livre d’occasion broché format poche de 11,2x17,8 cm, 192 pages

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