SAVELLI Anne – Décor Lafayette

Réf: rf-ifasdl
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Description

Extrait

1/   C’est l’heure. Mlle Lapierre disparaît par une porte avec ses possessions : traîne bleue, scène instable et sans loge. Qu’elle ne compte sur rien, surtout, les clous et les cordes le disent, les cloisons le répètent, le plafond n’en finit pas de le marteler. Chaque matin ce qu’elle voit des galeries, le clair, l’ample, elle le perd ici.

   Rester sans lumière et attendre. Entendre le patron hurler la plus grande femme du monde ! Entrez ! Entrez ! Attendre encore, assise, les mains sur les genoux, dans un réduit ou un couloir (tout est réduit, tout est couloir pour elle). Attendre de vendre ses bras, ses cuisses, ses cheveux. Se redresser se montrer se vendre en fouillant sa mémoire, décompter pour passer le temps les écorchures et les roulades, se souvenir du carré d’herbe de l’enfance qui, même pour elle, masquait le ciel : à gauche, racines, à droite, nuages, droit devant la frange des ombres. Allongée comme les autres elle devenait abstraite, une courbe dans le champ.

   Se lever et entrer et pousser un soupir. Se hisser si l’on peut sur la pointe des pieds. Tricher par la coiffure, les talons, le bonnet, être plus grande que grande, pour sectionner d’un coup le cristallin des hommes, fondre sur leurs enfants (pour qu’ils s’en souviennent toute la vie ?). Être plus grande que grande pour entendre à elle il faudrait plusieurs amants et imposer le silence juste en tournant la tête.

 

2/   Elle panique. Elle sent que dans son ventre quelque chose s’est noué en sortant du métro, un manque de lui qui n’est pas formulable, concevable, non, pas un seul instant, elle ne comprend pas, ce type pour qui elle n’est rien, avec lequel rien ne se passe, pourquoi l’obsède-t-il au point de s’arrêter net au centre de la foule et de vomir sur le quai, de la bile ou du sang peut-être pas mais un magma de mots, une pâte compacte, oui, elle a failli se raccrocher au premier venu , c’était un homme, il était habillé de gris, a voulu le prendre par le bras pour qu’il se retourne et la voit, l’emporte, l’arrête, la calme, l’assoie sur un siège du quai et l’invite à remonter en surface, à entrer dans un bar et accepter un verre – là, des images de film, New York, Chicago ou une ville de province seraient venues à la rescousse, elle et l’inconnu se seraient fait des confidences, seuls ou presque en salle, tandis que la serveuse aurait passé le balai sans écouter vraiment. Moi aussi, j’ai connu une femme qui était tout pour moi.

 

3/   Résumé

   Y aurait-il du danger, du risque dans ces lieux ? Un érotisme distinct de celui qu’ils nous vendent ? De la vie quelque part ? De la douceur ou rien que le tumulte, grondement, s’évanouir de fatigue dans les escalators, trop de tout et d’ennui ?

   Ces lieux ? il s’agit des grands magasins, dans lesquels se rend une femme qui remonte à pied la rue La Fayette, à Paris. Construction imaginaire, le Décor Lafayette s’inspire des Galeries du même nom, mais aussi du Printemps, du Palais-Royal ou des studios de Cinecitta pour plonger le lecteur dans un monde où les rayons permutent, où les époques se mêlent. Perte de repères assurée.

   Je vais aux grands magasins, lance la femme en marche : qui sait où cette phrase peut conduire ?

  

Descriptif

Editions Inculte Fiction année 2013 ISBN 9781091887007, Bon Etat général, couverture souple, tranche et dos légèrement passés et marqués, intérieur moyennement passés, tranches des pages un peu salies, livre d’occasion broché moyen format de 14,2x19,2 cm, 258 pages

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