Le livre de poche

JARDIN Alexandre – Des gens bien

Réf: rf-ldp32456
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Description

Extrait

1/   Avec le temps, à force de méditer ses incroyables transgressions, j’ai aussi fini par admettre avec terreur qu’il y a chez tout homme, ou presque, un invincible besoin de rester un type bien à ses propres yeux ; et une aptitude effarante à maintenir cette certitude même dans les situations les plus insoutenables, d’où le bien paraît e toute évidence banni. Les brutes épanouies qui se rasent le matin en riant aux éclats de leur infamie sont assez rares. Hélas, les tueurs gouvernementaux ont généralement une allure policée et un discours correct. Et, parfois, des pudeurs touchantes de lecteur de Jean Giraudoux.

   Peut-être est-ce pour cela que ma famille put, après la guerre, entretenir l’illusion que le Nain Jaune était resté propre dans ce bain de boue. Une sorte d’archange qui aurait couché sans séquelles avec le diable ; malgré le stupéfiant déboulé de mesures racistes qu’il avait assumées. Naïvement, les jardin (et moi pendant des années) se figuraient que pour participer au pire il fallait être un monstre aguerri, abruti d’idéologie ou purgé de toute moralité ; ce qui exonérait de fait le gentil et très chrétien Jean. Le genre d’homme qui ne dérogeait pas à ses principes d’honnêteté. Au point que personne chez les Jardin ne s’perçut jamais que le matin de la rafle du Vél d’Hiv il était bien aux manettes du régime.

 

2/   Souvent je me suis demandé comme le Zubial en écrivant Le Nain Jaune, avait pu à ce point abolir tout discernement. Il faut dire que mon père n’appartenait qu’à ses songes, et qu’il ne sut jamais se mélanger au réel. Fils d’une mère en lévitation morale, et d’un anticonformisme ahurissant, le Zubial avait été à bonne école.

   Elle fut son premier professeur de cécité ; celle qui lui apprit à toujours convoquer le romanesque pour éloigner la médiocrité, à faire provision d’illusions. En récusant ce qu’elle et lui appelaient la froide réalité ; dans laquelle il ne fait pas bon se baigner.

   Un soir que je l’interrogeais sur son pire souvenir de la Seconde Guerre mondiale, elle me répondit d’une voix pâle :

   - Un jour, à Charmeil (leur petit château près de Vichy), ton père avait commis avec Simon quelque chose d’odieux, d’indicible, d’impardonnable : ils avaient trouvé une scie et coupé les branches des arbres fruitiers : Le verger était en deuil.

 

3/   Résumé

   Tandis que mon père s’endort peu à peu contre moi, je lui parle une dernière fois. Plus tard, tu ne pourras pas vivre avec le secret des Jardin. Il te tuera… Tu feras un livre, Le Nain Jaune, pour le camoufler.

   Au même âge que toi, j’en ferai un, Des gens très bien, pour l’exposer. Et je vivrai la dernière partie de ta vie… La mienne.

   Dors mon petit papa, dors…

   Ce livre aurait pu s’appeler « fini de rire ». C’est le carnet de bord de ma lente lucidité.

 

Descriptif                                           

Editions Le Livre de poche 32456 année 2012 ISBN 9782253162353, Bon état général, couverture souple, dos et tranche légèrement marqués, intérieur frais, tranches des pages un peu salies, livre d’occasion broché format poche de 11,2x17,8 cm, 312 pages

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