Itinéraire d’un ogre

Extrait

1/   Pendant ses années d’adolescence, Gérard Depardieu a fréquenté deux types d’individus : les bourgeois et les voyous. Les voyous l’amusent et le distraient. Certains bourgeois l’intéressent ou l’inspirent. Leur présence est rassurante. Oh, il n’aime pas les bourgeois conformistes, ruisselants de bonnes manières. Pour lui, ils incarnent l’ennui, un égoïsme de caste. Gérard ne tolère la compagnie des bourgeois que s’ils lui apportent quelque émotion, un vent de liberté, un peu d’instruction. A Châteauroux, c’est rare. La plupart d’entre eux lui semblent sans vie, renfermés en eux-mêmes, sans profondeur e champ ; ça ne l’empêche pas de frayer avec plusieurs fils de bonne famille qui compteront dans sa carrière. Notamment les « deux Michels », Pilorgé et Denisot.

   C’est en 1963 qu’il fait la connaissance de Michel Pilorgé, Gérard a quatorze ans, Pilorgé dix-sept. Il est fils de médecin, élève studieux et appliqué. Il habite une grande maison, est servi à table par une domestique. L’argent n’est pas un problème pour lui. Gérard s’entraîne à la boxe, Michel, lui, s’intéresse au théâtre et au cinéma. Le choc des cultures. Le fils de notable et le prolo.

2/   Déterminante sur un plan privé, l’année 1971 le sera aussi pour la carrière de Gérard, comme l’écrit le critique Robert Chazal dans son Gérard Depardieu, l’autodidacte inspiré : « 1971, est une année importante, peut-être même l’année décisive. Sur le plan familial, la naissance de son premier enfant le stabilise. C’est une étape et un nouveau but. Pour le travail, il en a déjà trop. »

   Ce qui frappe chez Depardieu, c’est cette trajectoire fulgurante qui le fait se colleter avec la vie en se ménageant, à chaque fois, un coup d’avance sur ses contemporains. Livré à lui-même dès l’âge de sept ou huit ans, il étrenne ses premières armes dans la rue et pallie, à la maison, les absences du père. C’est lui qui, on s’en souvient, à aider à la venue au monde de son frère Éric. Il se vante souvent d’avoir été propulsé, sans escale, de l’enfance à l’âge adulte. C’est ainsi qu’à treize ans, il arborera la carrure d’un boxeur et fréquentera des prostituées et à qu’à seize ans, il débarquera à Paris et montera pour la première fois sur scène. C’est cette prodigieuse capacité à devancer l’appel, à devancer son âge dans tous les domaines de la vie, qui lui permet d’aller aussi vite, de passer devant les autres, même les plus doués.

3/   Résumé

   C’est l’histoire d’un ogre. Trop de films (200 au compteur) ; trop de télé, trop de vin, trop de pétrole, trop de pub, trop de sexe, trop d’argent ; la boulimie de Gérard Depardieu semble avoir vampirisé tous ses rêves d’enfant et d’adolescent. Il est le comédien le mieux payé du box-office français, malgré un nombre considérable de bides retentissants, mais il est également, le jeune loubard de Châteauroux devenu parrain du cinéma français, le loup efflanqué aujourd’hui propriétaire ventripotent de domaines seigneuriaux et d’hôtels particuliers. Sa vulgarité très étudiée, ses démêlés avec ses enfants et ses relations avec Fidel Castro comme avec Khalifa, l’homme d’affaires algérien aux méthodes sulfureuses, auraient été fatales à l’image de plus d’un personnage public. Pas à celle de Depardieu qui assume tout. Cette biographie n’est pas une plaidoirie ou un acte d’accusation : avec méthode et rigueur, Patric Rigoulet peint par touches successives le portrait d’un homme aux appétits et à la personnalité hors du commun. Il révèle ainsi de nombreuses facettes laissées dans l’ombre par les biographies officielles. Et décrypte la planète artistique du flamboyant interprète de Cyrano de Bergerac où alternent des nuits profondes et d’aveuglantes lumières.

Descriptif

Editions du Rocher année 2007 ISBN 9782268062884, Bon Etat général, couverture souple, tranche et dos légèrement passés et marqués, intérieur frais, tranches des pages un peu salies, livre broché d’occasion grand format de 14,2x22,2 cm, 336 pages