Grasset

ROY Jules – L’amour fauve

Réf: rf-gjraf
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Description

Extrait

1/   J’ai raconté dans un autre livre comment j’ai perdu Mao et j’ai brossé une esquisse de la maison. J’ai parlé de la courtine qui lui donne, quand on vient du bas, l’air d’une redoute. Mais si l’on vient du haut, c’est une demeure toute simple avec de grandes ouvertures, un large toit à quatre versants de tuiles plates percés de mansardes, de lucarnes à capucine et d’œil-de-bœuf. L’architecte qui l’a élevée sous Louis XVI aurait pu souligner sa façade d’un simple fronton : comme le nez de Cléopâtre, tout eût été changé. Le hobereau à qui elle appartenait n’a sans doute pas voulu offusquer par un luxe inutile ses fermiers qui vivaient en face, séparés des écuries par le noble portail de la grange, dans une bâtisse de même longueur, réplique de l’autre.

   Qu’ai-je à essayer de décrire cette maison ? Quand je l’ai achetée il y a dix ans, elle était en ruine, la seule tour qu’elle avait venait de s’écrouler. Je l’ai aimée tout de suite. A présent, si je l’aime toujours, c’est pour d’autres raisons, bien  que raison n’aille pas avec amour. A travers les ronces qui hérissaient, à l’époque, le jardin, j’ai vu, par une avancée du surplomb qui domine le pré, les collines qui bornent l’horizon vers le sud et, à l’ouest, la sombre falaise où est campée une célèbre basilique. On enfonçait dans le marécage de la cour. On butait partout contre des grillages de clapier et des pierres renversées, pas une porte ou une fenêtre qui fussent en état. Les enfants et les chouettes jouaient à tour de rôle dans ce manoir délabré, abandonné depuis un demi-siècle, que ses derniers propriétaires tenaient d’un héritage.

 

2/   Résumé

   Une boule rousse, « le poil déjà épais, le museau retroussé et la sauvagerie même » : une renarde de trois mois, prise au terrier, que l’auteur et sa femme ont recueillie dans leur maison de Bourgogne. Une charge de dynamite. Quelques heures lui suffisent pour mettre à sac la bibliothèque où on l’enferme, révolutionner le village et réveiller les vieilles haines paysannes contre l’ennemi des poulaillers, le franc-tireur, la « sale bête » qu’on tue, depuis des siècles. Il faudra la rendre à la forêt, le cœur serré.

   Expérience brève, violente, ce passage d’un être libre parmi les hommes qu’on dit civilisés est une révélation singulière pour Jules Roy, et pour nous. Il suffit, comme lui, d’être par nature « du côté des renards » des persécutés, pour ressentir très profond sa valeur d’exemple, et les hantises oubliées qu’elle ressuscite.

   C’est un récit tout simple, qui nous rend familiers la belle demeure de l’écrivain, la femme qui l’aime, le paysage qui l’inspire, et puis ses colères, ses joies, ses doutes, ses souvenirs soudain levés, comme des lièvres, au hasard des promenades. Mais c’est aussi la découverte d’un petit monde préservé, hors du temps, que menace l’avenir, l’inhumain futur d’un univers mécanisé, surpeuplé, envahi par la laideur et l’artifice, un temps où nul n’aura plus le loisir de goûter l’amour fauve de la liberté.

   Conte si l’on veut, fable moderne à la moralité sans illusions, ce livre habité apparaît surtout comme un portrait : celui d’un esprit lucide et tendre où chacun retrouve, à travers la courte rencontre d’un homme et d’un animal, l’obscure angoisse des lendemains, le regret d’une innocence naturelle où la « sauvagerie » allait peut-être de pair avec le bonheur.

 

Descriptif

Editions Grasset année 1971 ISBN 2264032774, Assez Bon Etat général, couverture souple, tranche et dos moyennement passés et un peu marqués, intérieur assez frais, tranches des pages salies, livre broché d’occasion grand format de 13,3x20,3 cm, 208 pages

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