Titre original « Barren Harvest »

Traduit de l’anglais par Jacqueline Souvré

Extrait

1/   Deux jours plus tard, Renton se trouvait dans le salon de la résidence Bayford et Mme Crichton était occupée à coudre une bande de crêpe sur son pardessus. Mentalement, il passa en revue une fois encore les détails de la journée et, certain de n’avoir rien omis, il tourna lentement la tête pour observer Mme Crichton. Avec la perspicacité d’un praticien, il se rendit parfaitement compte qu’en dépit de son calme apparent – elle semblait plongée dans sa tâche – elle était physiquement épuisée. Ses yeux battus et son teint blafard trahissaient deux nuits sans sommeil, et Renton fut submergé d’une colère froide. « Elle est capable de tout faire rater », pensa-t-il. Il se contint cependant et lui adressa la parole d’une voix onctueuse – ce qui n’était guère dans ses habitudes :

   - Vous avez fait ça magnifiquement, dit-il au moment où Mme Chrichton venait de casser le fil avec ses dents et lissait la bande de crêpe du plat de la main.

   - J’aurais pu faire mieux si j’avais eu davantage de temps, répliqua-t-elle, mais vous avez dit que M. David serait bientôt là.

2/   La pendule de la cuisine sonna onze heures et Mme Crichton, qui s’était vaguement assoupie, se réveilla immédiatement. Un court instant, elle eut l’espoir que Renton était arrivé sans qu’elle l’eût entendu, mais un coup d’œil danas la pièce la convainquit qu’elle était toujours seule. Un coup de vent ouvrit brusquement une fenêtre et elle alla la refermer. Des nuages noirs passaient devant la lune et Mme Crichton se dit qu’il allait pleuvoir sous peu. Elle eut alors la conviction que Renton ne se dérangerait pas. Elle devait s’en assurer. Elle alluma toutes les lampes et alla au téléphone pour composer le numéro de M. Cummings. A ce moment, la sonnette d’entrée retentit.

   - J’ai cru que vous ne viendriez jamais, dit-elle. Ne pouviez-vous pas venir plus tôt ? Il est plus de onze heures !

   Renton qui n’avait pas très bien dormi les nuits précédentes et s’était promis de se coucher tôt ce soir-là, était d’une humeur de bouledogue.

   - Je vous avais dit que j’emmènerais ma nièce au cinéma, grogna-t-il. Vous savez comment elle est ; elle veut tout voir : les actualités, le documentaire, le grand film. Ça vaut mieux comme ça, d’ailleurs. Elle est fatiguée. Elle me croit au lit et ne m’a pas entendu repartir. Que se passe-t-il ? Que vous arrive-t-il pour que vous me fassiez venir par une pareille nuit ?

   - Je ne puis rester dans cette maison. Je…

Descriptif                                           

Editions Librairie des Champs-Elysées Le Masque 446 année 1953, Assez Bon état général, couverture souple, dos et tranche un peu marqué, intérieur assez frais, tranches des pages moyennement salies avec un petit accroc sur la tranche, livre d’occasion broché format poche de 11,7x17,8 cm, 256 pages